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L'intégralité de nos interventions lors de la session du Conseil départemental de décembre 2023


Hugues Raimbourg et Christine Tellier


I/ Intervention en introduction de la session du Conseil départemental du Loiret des 14 et 15 décembre 2023


Monsieur le président, mes chers collègues,


Notre prise de parole concerne 2 sujets :


1) Le logement


Nous sommes heureux d'avoir, comme nous l’avions demandé (et merci à C. Braux), une meilleure lisibilité de la politique du logement du Conseil départemental avec le bilan de la délégation des Aides à la pierre ainsi que le diagnostic complet réalisé par l'ADIL, et la présentation qui nous sera faite pendant l’intersession de ce matin.

Nous attendons également pour l'année à venir le bilan du PDALHPD de la période 2018-2023.


La préfète, il y a un an, reconnaissait la pénurie de logements sociaux dans le Loiret, avec une demande très supérieure à l'offre, ce qui engendre un délai de plus en plus long pour obtenir un de ces logements sociaux.

En effet, d'après la Préfecture du Loiret, au 1er janvier 2021, le département comptait environ 15% de logements sociaux. Nous sommes donc bien loin encore, même avec les constructions et habilitations de 2022, de ce qu'impose la loi soit 20% de logement social dans chaque commune et donc dans l'ensemble du département.

On manque particulièrement de petits logements et de grands logements pour les familles nombreuses alors même que de nombreuses opérations prévues en 2022 ont été annulées par les bailleurs : on doit vraiment construire plus !

Vous l’affirmez vous-même, Monsieur le président, la politique du logement « constitue un enjeu pour l’aménagement et le développement économique du territoire du Loiret ».


C’est donc une forte volonté politique, tant nationale que locale qu’il nous faut.


Pour ce faire, nous devons aller au bout des choses.

Définissons un plan départemental de l'habitat qui aille plus loin encore que le PDALHPD et qui comporterait :

  • Les orientations politiques majeures du Conseil départemental au regard du cadre national :

  • La programmation pluriannuelle des objectifs pour y répondre ;

  • Les innovations et/ou expérimentations à mener ;

  • La structuration d’un observatoire départemental qui puisse apporter un diagnostic précis par bassin de vie de l’existant, des besoins et des attentes, en concertation avec tous les acteurs d’un territoire ;

  • Un suivi et une évaluation quantitative et qualitative du plan ;

  • Une analyse prospective.


Un toit pour tous est une priorité à concilier avec la transition énergétique, c’est maintenant une évidence.

Le logement est en effet une des principales sources d'émission de gaz à effet de serre.

Le bilan de la délégation des aides à la pierre se réfère aux contraintes de la transition écologique, mais ne sommes-nous pas encore trop modestes sur les attendus ? Il y a pourtant beaucoup de questions comme celle du bâti et de l'artificialisation, des énergies renouvelables, des écosystèmes...

On ne peut pas se contenter par exemple de ne rien faire de plus parce que « la géothermie c'est trop cher pour le logement social ». Il nous faut être plus volontaristes, c’est aussi de la responsabilité du Département d'orienter, d'inciter et d'aider les bailleurs sociaux à construire et à rénover les logements avec ces objectifs écologiques, et en se servant le plus possible de cette aubaine pour notre territoire qu’est la géothermie.

Qui le fera sinon ?


La transition écologique ne peut se faire sans la transition sociale, monsieur le président, chers collègues, et la transition sociale ne peut se faire sans la transition écologique.


2) RSA


Nous souhaitons également évoquer, vous vous en douter, l'extension de l’expérimentation France Travail et du RSA sous condition à l’ensemble du département en 4 points :

  • Une extension qui a lieu sans bilan de l’expérimentation ;

  • Des aspects financiers qui ne sont pas élucidés ;

  • Un travail en partenariat avec les associations de l’Insertion par l’Activité Économique qui est à améliorer ;

  • La question des sanctions et des motifs légitimes d’empêchement.


Une extension sans bilan


Le département du Loiret s’est porté volontaire pour expérimenter le nouveau dispositif dans l’est du département, avec le recrutement de professionnels dédiés.

Le calendrier initial, voté en session de juin 2023, prévoyait la « reprise du stock » (c'est-à-dire la prise en charge des 1150 BRSA cibles) entre juin et décembre 2023. Nous sommes encore en décembre 2023, aucun bilan n’a donc pu être réalisé.

Or, après l’annonce de l’adoption de la loi « Plein emploi », le 14 novembre dernier, appliquant les conditions du versement du RSA à l’ensemble du territoire, vous avez, monsieur le président, pris position le 17 novembre, et annoncé l’extension du dispositif à tout le Loiret pour Juillet 2024 sans attendre la parution du ou des décrets.

S’il est trop tôt pour tirer le bilan de l’expérimentation dans l’Est, estime-t-on que ce bilan n’est plus nécessaire puisque la loi est adoptée ?!


Pourtant, toute politique publique doit être évaluée et il serait bon de savoir :

  • Quel était le profil des personnes concernées (âge, sexe, foyer, zone d’habitation, durée du RSA…) ?

  • Combien de BRSA ont pu retrouver un emploi durable ? Dans quel type d’emplois ont-ils été recrutés ?

  • Combien ont été orientés vers les structures d’insertion ?

  • Combien ont-été sanctionnés ? Sur quelle grille de critères ? Combien ont bénéficié de dérogation et quels motifs ont été acceptés ou refusés ?

  • Quelle évaluation font les professionnels de cette expérimentation ? Combien de personnes avaient-ils à accompagner pendant l’expérimentation ? Leur avait-on donné un objectif d’économie sur les dépenses RSA ?

  • Et surtout, comment les bénéficiaires du RSA eux-mêmes ont-ils vécu et évalué ce RSA sous conditions ?


De plus, au-delà de la recherche d’emploi, les allocataires du RSA cumulent de multiples freins : isolement social, précarité de mobilité, problèmes de santé, garde d’enfants et précarité alimentaire...

On ne peut faire semblant qu’être au RSA ne tient qu’à leur seule responsabilité et que la sanction va résoudre leur situation.


L’amélioration des parcours d’insertion, en coordonnant les différents acteurs et en introduisant davantage de professionnel·le·s, peut fonctionner mais à condition que cela ne se fasse pas dans une logique unilatérale de coercition et de sanction.


Des aspects financiers qui ne sont pas élucidés.


Fin 2019, on comptait 2700 bénéficiaires du RSA dans le Montargois pour un total de 16 000 allocataires dans le Loiret, c’est à dire 6 fois plus.

Outre le fait que l’on peut se demander si, in fine, il y a 16 000 emplois DURABLES réellement accessibles pour ces personnes dans le département, le déploiement du dispositif implique donc 6 fois plus de BRSA à accompagner. Donc, en toute logique, 6 fois plus de professionnels dédiés à recruter par le Conseil départemental ?!

Ce n’est pourtant qu’à cette condition que les agents du Conseil départemental auront des « portefeuilles d’allocataires » réduits (50 personnes maximum au lieu de 150) et pourront faire de l’accompagnement personnalisé.


Est-ce que la convention à passer avec l’État envisage en conséquence une multiplication du budget par 6, soit près de 6 millions d’euros annuels ?

Probablement non, l’accompagnement promis ne sera donc pas au RDV ?

Quid des personnes à qui l’on exigera 15/20 heures d’activité sans même la contrepartie de l’accompagnement ? Subiront-ils tout de même des sanctions ?


Un travail en partenariat avec les associations de l’IAE qui est à améliorer


Les structures d’insertion par l’activité par économique ont un rôle majeur pour l’accompagnement et la remobilisation des BRSA les plus éloignés de l’emploi. Les BRSA qui sont orientés pas les services départementaux vers les associations d’insertion par l’économique sont donc, de facto, reconnus par ces services comme ne pouvant pas suivre le parcours des 15/20 heures en dehors de ces structures.


Or le partenariat n’est pas à la hauteur des enjeux :

  • Parce que les structures de l’IAE ne sont pas associées au montage de l’accompagnement des BRSA dans France Travail.

  • Parce que les structures de l’IAE font face à des difficultés financières importantes, dues en partie à la programmation du FSE+, qui n’est pas à la hauteur des annonces, et aggravées de manière conjoncturelle par la baisse de 10% de l’avance faite par le Conseil départemental en 2022 (qui explique d’ailleurs les 183 000€ de réduction de dépenses en DM2) alors même que les besoins sont impératifs.


Non, les associations d’insertion ne sont pas à priori de mauvais gestionnaires !

Leur objectif n’est pas celui de la rentabilité, ni même de l’enrichissement. C’est l’identité propre des associations à but non lucratif, et qui plus est de celles à qui l’on confie une mission de service public, d’être financées par des fonds publics.

Ces structures que sont les Ateliers et Chantiers d’Insertion (ACI) ont une rentabilité limitée parce que justement, elles accueillent et accompagnent les personnes les plus éloignées de l’emploi, quelquefois même qui ne pourront peut-être jamais pour des raisons de santé (physiques ou mentales) reprendre un emploi.


  • Comment leur demander de s’autofinancer, avec une productivité humainement impossible à atteindre ?

  • Quel appui le Département compte-t-il mettre en œuvre pour ces structures, qui vont être mises à contribution dans le cadre de France Travail ?

  • Comment le partage de 8,8 millions d’euros va-t-il s’opérer entre les services du Département dont les effectifs devraient nécessairement grossir et les structures ?

  • Quelle est la programmation pluriannuelle de ces sommes ?


Enfin, la question des sanctions et des motifs légitimes d’empêchement


La loi prévoit que, pour certains bénéficiaires, ces 15h hebdomadaires ne s’appliqueraient pas : problèmes de santé, parent isolé sans solution de garde...

  • Quels sont les problèmes de santé, et en particulier de santé mentale, qui constitueront des motifs légitimes et qui en jugera ?

  • Alors, dans quelles conditions la suspension du RSA sera-t-elle enclenchée ?

  • Comment seront évaluées les effets de ces sanctions quantitativement et qualitativement ?

  • Que deviennent les BRSA privés de cette ressource minimale pour ne pas sombrer dans la misère ?


Autant de questions auxquelles nous pensons qu’il faut répondre.


En tout état de cause, le RSA doit rester un revenu minimum de solidarité pour toutes et tous, un dernier filet de sécurité, par ce qu’avec 608 € par mois sans aide au logement pour une personne seule, monsieur le président, chers collègues, on ne vit pas, on survit et encore…!



II/ Politique touristique du Conseil départemental du Loiret autour des canaux


Nous nous interrogeons sur la politique d’aménagement du canal, en particulier concernant le bief entre Combleux et Orléans (au niveau du Cabinet Vert), propriété du Conseil départemental. Les coûts supportés cette année s’élèvent à près d’1 million d’euros, comprenant 500 000 euros de prestation à SOMIVAL pour des visites techniques sur le mur-digue du bief d’Orléans et 440 000 euros pour l’arrachage de la Jussie (une opération qui sera à renouveler chaque année pendant 3 ans au minimum).

Est ce que le canal a un avenir, en tant que voie navigable, au vu de ces coûts et au vu des sécheresses estivales, qui ont déjà conduit à la fermer à la navigation pendant l’été ? La navigation de plaisance est de plus décevante le longs des canaux de Briare et du Loing, qui sont les voies d’accès au canal d’Orléans. Ceci suggère que le potentiel touristique du Canal d’Orléans autour de la plaisance est très limitée.

Au vu de ces éléments, dans le cadre de l’adaptation au changement climatique, et du faible potentiel touristique, nous sommes opposés aux investissements réalisés sur le bief d’Orléans. 



III/ Convention entre la métropole et le département concernant la voie cyclable le long du canal, entre Orléans et Chécy


La piste cyclable décrite dans le projet, réalisée en 2020, n’est pas du tout à la hauteur des attentes d’une politique des mobilités ambitieuse, notamment dans sa section entre Combleux et Chécy. Il est précisé dans la convention que la Métropole s’engage à maintenir les aménagements réalisés, pas à les améliorer.


Or cette voie est un des axes structurants de la Métropole, c’est aussi un axe touristique majeur pour la Loire à vélo, et pour la véloroute le long du canal. Il faut que des investissements soient réalisés pour assurer la continuité du réseau. On pense par exemple à l’exemple de Rogny les 7 écluses, qui est un vrai problème le long du canal de Briare. Il ne faut pas reproduire les mêmes erreurs, et livrer un itinéraire performant le long du canal d’Orléans, qui s’arrêterait à 7km du centre-ville d’Orléans.



IV/ Participation du Conseil départemental du Loiret à la commission régionale de l’énergie


Un des objectifs de la Commission régionale de l’énergie est la fixation des objectifs de développement des renouvelables, notamment par le biais des zones d’accélération des énergies renouvelables.

Les objectifs fixés nationalement sont très élevés : faire 33% de la consommation finale en 2030, alors que le pays n’atteint même pas 20% en 2019 (pour un objectif de 23%). Un des dispositifs mis en place consiste à exiger des communes la définition de zones d’accélération des ENR, et à engager un dialogue entre le niveau régional et les communes, pour atteindre les objectifs retenus.

Nous demandons au Département à ce qu’il participe activement au soutien au déploiement des ENR sur son territoire, notamment par le biais de ses services d’ingénierie, Cap Loiret, qu’il peut mettre à disposition des plus petites communes (comme en matière de politique de l’eau). La carte des installations éoliennes existantes montre de très fortes disparités, et le Département doit déployer toutes ses capacités pour promouvoir les installations dans les zones où elles sont encore absentes, notamment pour soulager les zones où les éoliennes sont très densément distribuées et où elles suscitent une opposition importante.


V/ Convention de Délégation des aides à la pierre 2024-2029


Le passage obligé de la convention avec l’État dite de type 2 au type 3, sans financement complémentaire, engendre une mise en œuvre par le Département lui-même des missions auparavant exercées par les services de l’État et notamment l’instruction le paiement et le contrôle des opérations d’amélioration de l’habitat par les communes.

Le département du Loiret envisage de se rapprocher du département d’Eure et Loir, dans la même situation. Sachant que l’ADIL 45 étend son action au département du 28, il paraît cohérent et pertinent de mutualiser les missions entre les deux collectivités.


Cependant, le rôle à tenir concerne toute la chaîne de décision, de financement et de contrôle et comporte un risque potentiel de conflit, voire de conflit d’intérêts.

Nous suggérons donc que cette mutualisation s’exerce de manière croisée, le 28 pouvant instruire et contrôler pour le 45 et vice-versa. Cette méthode, au-delà des économies espérées, apporterait précaution et objectivité des procédures.

Enfin, le projet de convention pluriannuel concerne 1800 logements sociaux pour un stock de demande de 3200 en 2020, le problème d’insuffisance majeure de l’offre ne sera donc pas résolu.

Notre Département pourrait faire un choix politique fort pour le soutien financier aux bailleurs sociaux, couplée à des exigences de rénovation énergétique et de construction écologique renforcée, en recherchant des fonds de soutien en s’appuyant davantage sur la géothermie, et en leur réattribuant des financements attribués actuellement à des compétences non obligatoires.


VI/ Rapport d’orientations budgétaires


Malgré les discours catastrophistes de la majorité, les résultats des deux dernières années permettent de ne pas recourir à l’emprunt et de rembourser le stock de dette depuis 2021 : 33,2Meuros de dette remboursée en 2022 et 35,5Meuros de dette remboursés en 2023. Même s’il est probable que la situation budgétaire en 2024 soit moins favorable qu’en 2023, le Département dispose toujours de marges de manœuvre importantes pour accomplir ses missions, notamment concernant la politique sociale.

En ce qui concerne la prévision des dépenses, l’exécutif ne prévoie pas d’augmentation des charges liées au RSA, en pariant sur un nombre important d’allocataires qui sortiraient du dispositif, compensant les surcoûts liés à la revalorisation des montants du RSA en avril 2024. Est-ce vraiment réaliste ? Cela signifie que 5% d’augmentation du montant du RSA en avril 2024 doivent être compensés par la sortie de 5% des allocataires, c'est-à-dire environ 800 sur l’ensemble du Département.

Nous craignons que France Travail ne soit pas à la hauteur de telles attentes, surtout dans un délai si bref, et dans un contexte où le chômage remonte et pourrait conduire à l’inverse à une augmentation des arrivées dans le RSA.


Nous regrettons aussi que les subventions aux collèges ne soient augmentées que de 2%, c'est-à-dire en dessous des 2,6% de l’inflation prévus en 2024 par le projet de loi de finances de cet automne. Même si certains collèges disposent d’un stock de trésorerie important, ce n’est pas le cas de tous, et certains collèges font même face à des difficultés importantes, qui les conduisent à renoncer à des actions pédagogiques tout à fait nécessaires. Par ailleurs, l’exécutif a renoncé à pérenniser le mécanisme de solidarité entre les collèges, permettant aux établissements les plus favorisés de soutenir les plus fragiles. Dans ce contexte, il nous semble que l’augmentation des subventions versées aux collèges pour leur fonctionnement est insuffisante.


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