Nos interventions lors de la session du Conseil départemental de juin 2025
- vpeleloiret
- 16 juil.
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I/ Introduction
Vous avez l’habitude dans vos propos introductifs, M. le président, de présenter la situation du département à la lumière des décisions qui sont prises et nous sont imposées par l’Etat. Vous avez fait valoir à de nombreuses reprises les transferts de charge qui ne s’accompagnent pas d’une compensation financière correspondante, ou encore le faible niveau de DGF (dotation globale de fonctionnement) par habitant dont nous bénéficions. Cette insuffisance de nos recettes reflète l’état général des recettes des collectivités territoriales et de l’Etat, qui ne réussissent pas à couvrir l’ensemble des besoins.
Pour reprendre un débat récent comme exemple, comment ne pas être préoccupé par l’état de la médecine scolaire et par les conditions de suivi psychologique de nos adolescents par l’Education Nationale. Bien sûr on peut toujours prétendre que des économies sont possibles, que des gisements de ressources existent sans augmenter les prélèvements ; mais on constate à l’épreuve de cet exercice qu’il est bien difficile de diminuer significativement les dépenses sans dégrader notre action. En revanche, une proposition de loi visant à mettre en place une taxation plancher pour les contribuables ayant une fortune dépassant les 100 millions d'euros, dite « Taxe Zucman », a été examinée au Sénat le 12 Juin dernier. Malgré ses promesses de plus grande justice fiscale, et son intérêt évident pour diminuer le déficit budgétaire, cette proposition a été malheureusement rejetée par la majorité de la droite et du centre à la chambre haute. L’essentiel de nos missions concerne la solidarité, et à ce titre la taxe Zucman a le grand mérite de contribuer elle aussi au rééquilibrage de la richesse, dans un contexte où les inégalités de revenus et encore plus de patrimoine ne font que croître d’année en année.
La solidarité dont il est question ici est au cœur du Pacte des Solidarités que nous examinons lors de cette session. Sur les 3 axes, la convention signée en 2024 avec l’Etat établissait un niveau de financement à hauteur de 770 000 euros pour chacun des partenaires que sont l’Etat et le Département. La délibération réactualisant la convention diminue ce financement à parité à hauteur de 609 000 euros, actant une baisse de près de 160 000 euros. Dans le détail, ce sont tout un ensemble d’actions qui font les frais de ces diminutions de moyens, depuis l’accompagnement des 18-21 ans sortis de l’aide sociale à l’enfance, jusqu’au soutien aux bénéficiaires du RSA parmi les gens du voyage. Il nous semble au contraire indispensable de maintenir, sans les diminuer, les budgets dédiés aux actions de lutte contre la pauvreté et les inégalités contenues dans ce pacte.
Sur le volet insertion du pacte des solidarités, l’Etat consacre toujours une somme importante, près de 1 million d’euros, à l’accompagnement des bénéficiaires du RSA sur l’est du département ; mais qu’en est-il sur l’ensemble du territoire Loirétain, alors que la généralisation du RSA rénové s’applique depuis le 1er janvier à tout notre département ?
Pour finir, c’est aussi une diminution des ambitions en termes de d’écologie et de solidarité qu’actent les pactes territoriaux en faveur de l’habitat. Comme nous l’avons relevé lors des sessions précédentes, le département a renoncé à contribuer au financement sur son propre budget des rénovations énergétiques, pour ne conserver que les travaux en faveur de l’adaptation. Ce choix résonne de manière malheureuse avec la suspension temporaire de MaPrimRenov, dont on nous explique qu’elle fait l’objet de fraudes multiples, mais qui n’est pas remplacée par quelque dispositif que ce soit, au moment même où les ambitions en termes de diminution des GES s’accroissent. Nous vous demandons instamment de revoir ces décisions, en remettant au centre de notre stratégie l’aide à la rénovation énergétique, et notamment à destination des ménages qui souffrent de précarité énergétique, et en maintenant, au lieu de le diminuer, l’effort budgétaire en faveur du Pacte des Solidarités, dans un effort de justice sociale et de redistribution qui est commun avec celui de la proposition de taxe Zucman.
II/ Protection de l’enfance
Les travaux pour mettre en œuvre les recommandations de la Mission d’Information et d’Evaluation se poursuivent, et des avancées importantes ont été réalisées. C’est l’occasion de prendre en compte les propositions issues du rapport d’enquête parlementaire sur les manquements des politiques publiques de protection de l’enfance du 1er avril 2025 pour ce qui concerne les départements.
Certaines relèvent donc d’obligations légales non-respectées. D’autres propositions concernent des actions qu’un département peut faire de son propre chef, que des changements législatifs, réglementaires ou budgétaires permettent ou non d’aller plus loin. D’autres encore peuvent être impulsées par le département, en relation avec d’autres acteurs. Enfin, le département peut se porter volontaire pour certaines actions, par exemple dans le cadre d’expérimentations.
En ce qui nous concerne, plusieurs de ces recommandations sont déjà mises en œuvre ou en cours, reste toutefois l’accueil des MNA (mineurs non-accompagnés) en hôtel, obligation non respectée.
Mais, s’il ne faut prendre qu’un seul point, je retiendrai celui-ci, (p137 du rapport parlementaire disponible ici : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/organes/autres-commissions/commissions-enquete/protection-de-l-enfance/documents?typeDocument=rapport%20d%27enqu%C3%AAte ) :
« La rapporteure appelle … à un investissement massif dans la prévention, qui doit permettre à terme de réorienter les dépenses des départements, grâce aux marges de manœuvre financières dégagées par le nombre de placements évités. »
Le rapport invite largement à investir dans la prévention, notamment la prévention spécialisée, mais pas que, ainsi que dans la lutte contre la pauvreté. Il y a de véritables leviers actions permettant d’éviter les placements. Et en particulier dans le champ de l’accompagnement à la parentalité :
- Mettre en place un plan d’accompagnement à la périnatalité et à la petite enfance 2026-2030.
- Soutenir le programme de promotion de la santé et de l’attachement des nouveau-nés et de leurs jeunes parents (PANJO).
- Mener des actions ciblées d’accompagnement à la parentalité pour les parents en situation de handicap et pour les parents d’enfants en situation de handicap.
- Développer un programme sur le modèle du programme québécois « Agir tôt », qui permet notamment d’apporter des réponses pour le repérage et la prise en charge des troubles autistiques.
En fait, l’accompagnement et le soutien à la parentalité relève d’une myriade d’actions possibles de la part de l’ensemble des acteurs publics. Le département a pleinement compétence à intervenir dans l’ensemble de ces axes, ou a minima à soutenir les associations qui interviennent dans le domaine
La PMI (Protection Maternelle et Infantile) fait déjà beaucoup, et maintenant, dans le Loiret tous les enfants ont un bilan de santé avant 6 ans, ce qui n’est pas le cas dans tous les départements, pour exemple. Elle peut probablement dédier des moyens actuels au déploiement d’un plan de prévention petite enfance 2026/2030.
C’est pourquoi, il semble indispensable de mener une Mission d’information et d’Évaluation de la protection de la petite enfance, volet en amont de la MIE précédente, qui mettra en exergue les atouts de l’existant et les pistes de travail pour éviter les placements, donc pour le mieux vivre de familles entières, enfants et parents mais aussi professionnels actuels qui tirent une nouvelle fois la sonnette d’alarme.
Pour conclure, il faut commencer à penser et donc à financer différemment afin d’agir structurellement (et pas uniquement tenter de tenir la tête hors de l’eau dans le fonctionnement actuel). Le premier axe est celui de la petite enfance, mais il faudra aussi élargir à l’aval de la prise en charge y compris la prévention spécialisée et les MNA, et associer tous les modes d’intervention participant à la prévention des petits comme des plus grands : le sport, l’art, la culture, la citoyenneté…
J’en reviens donc à mon propos et ma demande de début de mandat : un schéma pluriannuel de prévention dans le département du Loiret.
III/ Bilan des accidents sur les routes départementales
Le bilan est mauvais en termes de mortalité, avec 23 morts, en cohérence avec les statistiques sur l’ensemble du Loiret qui montrent elles aussi une mortalité très fortement en hausse, avec 43 morts pour 2024. Face à cette recrudescence des morts sur la route, le département intervient de manière volontariste pour sécuriser les zones qui génèrent des accidents.
Par contre revient de manière insistante dans le rapport l’idée que la vitesse n’est qu’un facteur secondaire dans la mortalité sur la route. On oublie avec cette affirmation le rôle que joue la vitesse dans la gravité des accidents. Même si un accident n’est pas dû à un excès de vitesse, plus la vitesse est élevée, plus les conséquences des chocs sont lourdes ; en cela l’augmentation de la vitesse maximale autorisée de 80 à 90 km est un facteur de mortalité. Par exemple, les distances de freinage augmentent de 57 à 70m en passant de 80 à 90km/h.
Pour finir, je voudrais revenir au bilan qui est fait chaque année des portions de routes départementales passées de 80 à 90km/h. Cette comparaison suppose que nous puissions disposer de données suffisantes pour être statistiquement représentatives. Or la période où la vitesse a été abaissée à 80km/h est trop brève, au vu de la longueur de routes concernées, pour que les données correspondantes soient suffisamment représentatives. Si par contre on regarde l’ensemble des routes de France, on obtient alors des données statistiquement robustes, qui indiquent que la diminution des vitesses de 90 à 80km/h, s’est accompagnée d’une baisse de la mortalité significative : -12%, correspondant à une diminution du nombre de tués de 331 personnes sur les 18 mois qui suivent la mise en place de la mesure (alors que la mortalité est restée constante sur la même période sur le reste du réseau). On peut donc poursuivre cette comparaison à l’échelle du Loiret aussi longtemps qu’on voudra, la faiblesse des chiffres réside dans la période à 80km/h, qui la rend caduque, et on ne peut que s’appuyer sur les chiffres et les conclusions de l’étude nationale, qui démontre l’intérêt de diminuer les vitesses pour diminuer les morts sur la route.
IV/ Bornes de recharge électriques
Je profite de ce rapport pour demander un bilan de installations mises en œuvre par le département.
Se pose aussi la question des copropriétés, et de comment y faire installer des bornes ?
Concernant le SDIRVE (Schéma Directeur d'Infrastructures de Recharge pour Véhicules Electriques), voté en session de Juin 2024 : ce schéma prend acte de la nécessité de soutenir le déploiement des infrastructures de recharge sur l’ensemble du territoire et pas seulement sur la métropole. Sur le département hors Orléans métropole, il est prévu de passer d’un peu moins de 300 points de charge à un peu plus de 3000, c’est-à-dire une multiplication par plus de 10. Ce déploiement implique plusieurs acteurs, dont le département qui porte une large proportion du projet. Sur la période 2024-2025, sur la compétence du département, il est prévu dans le schéma le déploiement de 18 Points De Charge rapides et 51 normaux. Qu’est ce qui a été effectivement réalisé ?
V/ Pactes territoriaux
Vote : abstention
Comme exposé par Hugues en introduction, nous sommes toujours opposés à la suppression des aides propres du département pour la rénovation énergétique qui affecte les projets des foyers modestes et plus modestes mais aussi certaines opérations de bailleurs sociaux. En conséquence, nous nous abstenons, sans que les contenus des pactes eux-mêmes ne soient directement en cause.
VI/ Pacte de solidarité et ADAGV
Le pacte de solidarité, dont il a été question en introduction, intègre des choix de recyclage de certaines actions qui ne sont pas équilibrés et pas pensés, me semble-t-il, politiquement. Pour exemple, la totalité des dépenses de prévention spécialisée financés sur d’autres fonds auparavant sont maintenant financés par le pacte, ce qui est trop. Son poids budgétaire entraîne des coupes pour d’autres actions qui sont injustes, contradictoires avec les missions essentielles du département (comme la prévention pour la protection de l’enfance) et en particulier les fonds pour la mission d’accompagnement des bénéficiaires du RSA et des indépendants de l’ADAGV (Association Départementale Action pour les Gens du Voyage). Vous diminuez leur financement de 25 000€ donc d’environ un mi-temps. Or, un ETP (équivalent temps plein) de l’ADAGV gère 150 à 200 dossiers, et la qualité de leur travail est reconnu par les services comme par les élus. Un mi-temps de moins pour l’ADAGV, c’est environ 75 à 100 personnes potentiellement non-accompagnées qui vont aller où ? Eh bien, à La Cité Loirétaine, cela tombe bien, il y a un grand parking pour les caravanes.
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